Le rapport (en anglais) publié par la BCE la semaine dernière (fin octobre) reconnaît l’existence de systèmes monétaires alternatifs en soulignant la menace qu’ils représenteraient pour cette institution, tout en omettant d’évoquer aucun de leurs avantages pour les citoyens et l’économie réelle.
Selon Gonzague Grandval, CEO de Paymium, la start up française spécialisée dans les solutions fondées sur Bitcoin, «ce rapport de la BCE confirme l’émergence de Bitcoin dans le paysage technologique des moyens de paiement».
Pourtant, le rapport pose un vocabulaire déjà tout à fait tendancieux opposant monnaies centrales et monnaies « virtuelles ».
En fait, les monnaies centrales sont devenues « virtuelles » depuis 1973 et la fin de la convertibilité dans un actif réel.
Elles reposent seulement, comme toutes les autres monnaies numériques, sur le consensus d’une communauté pour les utiliser, en l’occurrence la communauté nationale pour les monnaies centrales. Le consensus est alors imposé par l’obligation légale d’utiliser ladite monnaie centrale pour éteindre une dette fiscale, contrairement au consensus librement choisi d’une communauté en faveur d’une monnaie numérique alternative.
Curieusement le rapport mélange pommes et oranges, technologie libre (Bitcoin) et monnaie centralisée (Linden Dollars), comme pour gommer la signification véritable de l’invention de Bitcoin : donner à chaque internaute libre accès à une technologie de transactions électroniques capable de se substituer au moins pour partie aux technologies auparavant réservées aux systèmes bancaires. La BCE préfère ignorer les impacts positifs qu’aura Bitcoin sur l’économie européenne à mesure que son adoption par les marchands se développera : réduction des coûts et des délais de transactions, amélioration des parcours clients, compétition accrue entre les fournisseurs de services de paiement. Le prélèvement des services bancaires sur l’économie réelle sera réduit d’autant, au profit de l’investissement, de la créativité et de la production de richesse réelle.
Sous l’angle règlementaire, les sociétés opérant via le réseau Bitcoin comme Paymium se soumettent déjà aux exigences des procédures anti-blanchiment (AML) et connaissance du client (KYC), de sorte qu’en réalité, aucun risque nouveau n’est introduit par Bitcoin.
En synthèse, la BCE voit une menace dans une initiative communautaire émergente comme Bitcoin tandis que la financiarisation de l’économie qui débouche sur une création illimitée d’actifs quasi-monétaires du fait de leur liquidité comme les CDS ne serait que l’expression de l’économie de marché.
Gageons que ce double standard, n’empêchera pas les citoyens européens de découvrir et adopter les nouveaux usages du paiement mobile «ouvert» grâce à Bitcoin, souvent plus sûrs et plus pratiques que les cartes bancaires ou le cash.
J'ai écrit ce post initialement pour l'excellent blog Services mobilesde Christophe Romei.