La consommation énergétique de l’algorithme PoW reste le mantra favori des crypto-sceptiques. Le sujet est abondamment couvert par des publications dénuées de toute rigueur scientifique qui tentent de démontrer que cette consommation serait excessive. Excessive par rapport à quoi d’ailleurs ?
A. Antonopoulos a souligné déjà le rôle particulier de l’énergie dans l’échelle des valeurs, l’énergie pouvant être considérée comme la seule valeur universelle, toutes les autres formes de valeurs étant davantage subjectives. En effet, si l’énergie est nécessaire à tout processus de transformation donc à tout projet, sa valeur est liée aux limites physiques du stockage et/ou du transfert alors que son utilisation dans tel ou tel projet est discrétionnaire.
Ainsi, quand nous n’utilisons pas un système, sa consommation nous semblera forcément excessive. La BCE, a déclaré le réseau Bitcoin “énergivore” car elle n’a aucune l’intention de l’utiliser, même pas pour expérimenter. D’ailleurs, l’utilisation de l’euro étant obligatoire pour payer les taxes, la BCE estime sans doute que sa consommation énergétique ne fait pas débat. Avec un coût opérationnel annuel de plus de 2000 milliards de dollars, le système bancaire mondial a pourtant une facture d’électricité globale probablement supérieure à celle des mineurs Bitcoin, voisine de 5 milliards.
Pire, l’impact énergétique de l’argent-dette monopolistique ne se limite pas à sa consommation car le monopole décide aussi les financements de projets d’infrastructures énergétiques. Ces prêts bancaires octroyés par une oligarchie non-élue vont souvent à l’encontre des politiques publiques souhaitées par la majorité des citoyens.
Dans son édition du 25 novembre 2018, Le Monde titrait sur les banques françaises fléchant la création monétaire vers des énergies fossiles, synonymes de profits à court-terme tant que les coûts réels pour l’environnement ne sont pas imputés aux producteurs.
Outre la décentralisation de la confiance, le minage Bitcoin incite à la recherche d’une électricité au meilleur coût car, contrairement à l’or, le minage de Bitcoin peut s’installer au plus près des gisements d’énergie. La proportion d’énergies renouvelables dans la consommation du minage Bitcoin se monterait à 77% selon Dan Held qui écrit:
“En agissant en tant qu’acheteur d’électricité de dernier ressort, Bitcoin crée un prix plancher qui incite à financer des projets autour de nouvelles sources d’énergie qui seraient restées autrement inexploitées.” En d’autres termes, lorsqu’une énergie ne peut pas être stockée, sa valeur peut l’être grâce au minage Bitcoin.
Le financement des énergies renouvelables devient même prioritaire lorsque les progrès de la technologie de minage se heurtent à la loi des retours décroissants. Début 2019, Bitmain Technologies Ltd a annoncé son nouvel ASIC 7 nm SHA256, le BM1397, pour le minage de Bitcoin. Selon Bitmain, ce circuit offre un rapport consommation/puissance de calcul de 30 J/TH, une amélioration de 25% par rapport au précédent ASIC BM1391.
Le tableau suivant estime l’efficacité énergétique du réseau Bitcoin en 2018 autour de 100 J/TH.
Cet écart d’un facteur 3 révèle l’inertie du parc installé des équipements de minage qui ne sont évidemment pas renouvelés instantanément.
La puissance de calcul du réseau Bitcoin se monte aujourd’hui à 50 million TH/s, davantage que lors de la bulle de décembre 2017, lorsqu’on pouvait mesurer un taux de hachage de 12 million de TH/s.
La consommation théorique du réseau s’établit donc autour de
30 J x 50 million TH/s = 1 500 MJ/s soit une énergie cumulée de 13.14 TWh sur un an.
A titre de comparaison, on estime qu’il faut 15 MWh pour produire une tonne d’aluminium en fusion (avant usinage et logistique donc). Avec 64 million de tonnes produites en 2018, on peut donc estimer que la production d’aluminium consomme à elle seule plus de 960 TWh par an.
On est aussi très loin de la consommation estimée du minage de l’or (132 TWh par an), commodément ignorée dans les publications des lobbys bancaires. De même, la dangerosité du minage de l’or, provoquant 50 000 morts chez les mineurs sur les 100 dernières années, est passée sous silence. Il faut dire que la Banque de France est lourdement investie en or (2 436 tonnes, soit environ 90 milliards d’euros au cours du jour) tout en ayant fait le choix d’une impasse totale sur Bitcoin. Ce choix extrême, dont les conséquences risquent fort de revenir hanter les locaux rue de la Vrillière, reflète bien la culture d’une institution tournée vers le passé.
Pour en savoir (encore) plus:
“PoW is efficient” par Dan Held
Empreinte carbone de bitcoin, légende ou réalité par Sébastien Gouspillou
Why “energy consumption” math sucks par A. Antonopoulos
The Bitcoin Mining Network, dossier publié par Coinshares Research